"Si l'art n'a pas de patrie, les artistes en ont une." Camille Saint-Saëns

"Un seul rêve est plus puissant qu'un millier de réalités." J.R.R. Tolkien

samedi 9 février 2013

Tournoi des Nouvellistes - Finale : Jérémy Semet / Alizée Villemin



Vous trouverez ci-dessous le planning du tournoi actualisé. Cliquez sur l'icône pdf pour le visualiser.



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Alizée Villemin, avec sa nouvelle Dragon Ronchon, a remporté la seconde demi-finale face à Scalp et sa Destination incorrecte (51 votes - 65,38 % - contre 27 votes - 34,62 %). Bravo à Alizée qui part en finale et à Scalp pour son très bon texte. Nous espérons le lire à nouveau très bientôt !


Après 14 semaines de Tournoi, voici enfin venue l'heure de la grande finale qui va opposer Jérémy Semet (Ô Sombre Héraut) à Alizée Villemin (Dragon Ronchon). Lisez ou relisez les deux nouvelles et votez ensuite, grâce au module situé tout en bas de cet article, pour votre texte préféré. Vous avez une semaine, jusqu'au vendredi 15 février 2013, 23h59, pour voter. Celui qui aura obtenu le plus grand nombre de votes l'emportera et sera déclaré gagnant du Tournoi des Nouvellistes.

N'hésitez pas à donner votre avis sur ces nouvelles dans un commentaire, en fin d'article. Les auteurs attendent avec impatience vos retours sur leurs textes, c'est important et constructif pour eux. Pour cela, cliquez sur le titre de l'article pour voir ce dernier en entier et descendez jusqu'en bas. Un espace réservé aux commentaires s'y trouve.

Bonne lecture et souhaitons bonne chance à nos finalistes 


Finale



 
Ô Sombre Héraut
de


 
1

     Hormis la cargaison, vous serez seul à bord du navire.

     La conversation qu'il avait eue avec son interlocuteur lui revint en mémoire, de manière épisodique, fragmentaire, alors qu'il filait à bord de la navette en direction de la station de transit. Certaines phrases le troublaient davantage à mesure qu'elles gagnaient son esprit et qu'elles s'y nichaient comme l'aurait fait un parasite. Et maintenant qu'il prenait la pleine ampleur de la tâche à accomplir, voilà qu'il ne s'en sentait plus vraiment capable, doutant de ses capacités.
     Les conditions du contrat l'inquiétaient.
     Durée du voyage. Quantité du chargement. Nombre exact de stations jalonnant son parcours. Voilà les points qui retenaient son attention alors qu'il passait en revue les fiches plastiques qui lui avaient été remises après l'entretien – des fiches de tailles et de couleurs différentes dont la fonction de certaines lui échappait déjà. Mais il avait donné sa parole et ne pouvait plus refuser.
     Ce qui l'avait poussé à agir était cette absence d'attache : aucun poids n'entravait ses chevilles. Il pouvait prendre son envol, voyager où bon lui semblait. Personne n'allait lui rappeler, à la faveur d'un message électronique envoyé à la hâte, que sa présence manquait à ses proches ou que la chaleur de son corps était réclamée au côté d'une ravissante jeune femme brûlante de désir. Non, ce n'était pas le karma qui avait été établi pour Sid.
     La navette s'arracha à l’atmosphère terrestre, secouée de toutes parts, laissant d'épaisses gerbes brûlantes dans son sillage. La brusque accélération de l'appareil fit gronder les réacteurs et les passagers purent apercevoir par les étroits hublots de l'habitacle l'immense structure se rapprocher à grande vitesse : gigantesque pic de métal pivotant sur son axe et couronné de lumière. Arrimée à la station, patientait une cohorte d'autres navires de classe moyenne qui n'attendait que leurs occupants pour pouvoir repartir.
     Sid avait toujours eu un penchant pour tout ce qui pouvait voyager. Piloter était son affaire ; même si cela dépassait son entendement. Il avait un don pour tout ce qui touchait à la navigation comme certains comprenaient la subtilité de quelques vers de poésie sans avoir eu besoin de l'étudier à l'école. Il était né ainsi et ne pouvait blâmer ni remercier quiconque.
     L'habitacle se para de rouge : signe que la rencontre avec la station était imminente.
     À l'extérieur, le ballet stellaire se produisait, sans répit : le seul spectacle dans tout le cosmos qui n'eut besoin d'aucune répétition et qui ne donnerait jamais de secondes représentations. Les étoiles tournaient tout autour de la navette, minuscules moucherons fluorescents prisonniers d'une infinie toile faite de néant.
     Enfoncé dans la banquette de la navette – banquette de si mauvaise qualité qu'une barre occupait la partie basse de son dos, annonçant un début de sciatique –, Sid anticipa l'étape qui suivit, enserrant les accoudoirs de ses doigts endoloris par l'effort. Bien qu'ayant participé à des centaines de vols de ce genre, Sid redoutait plus que tout le moment de l'amarrage ; une peur qu'il ne pouvait ni rationaliser et encore moins expliquer.
     Les sas pneumatiques se rejoignirent, scellant une amitié qui ne dépassa pas le temps du déchargement. La navette s'agita une toute dernière fois avant de s'éteindre, plantée dans la station comme le dard d'une guêpe dans la peau d'un enfant turbulent.
     Sid quitta son siège, fourrant les fiches plastiques dans la poche intérieure de sa veste, cherchant du regard la sortie. Une fois le sas franchi, il longea les goulottes de lumière qui courraient au sol, traçant le chemin qui le mènerait à son nouveau chez lui. Les autres voyageurs – des ouvriers bossant dans d'obscures concessions minières disséminées aux quatre coins de la galaxie – se pressaient, se bousculaient pour parvenir à temps jusqu'à leur prochain transporteur, étroite coque de fortune qui les conduirait à l'autre bout du système solaire. Du moins le supposait-il.
     Dans son dos, la navette brisa le lien qui l'unissait à la station et disparut dans la nuit éternelle. À ce moment, Sid envia ce morceau de métal qui fonçait vers la Terre. Oui, ce qu'il pouvait l'envier : car, au moins, il était possible à la navette de retourner d'où elle venait. Mais pas Sid. Cela ne lui avait pas été clairement stipulé durant le briefing, mais il sentait que son voyage serait un aller sans retour.
     Il suivit les faisceaux lumineux, les anneaux d'or fixés à ses oreilles crépitant dans la pénombre, et se retrouva nez à nez avec une immense porte au revêtement bouffé par la corrosion. À droite de la porte brillait une fente ressemblant à un lecteur de carte. Sid jongla un assez long moment avec la quantité de fiches qui était désormais les siennes. Rouge. Bleu. Verte. Jaune. Il y en avait même une où l'on pouvait voir au travers. Laquelle choisir ? Il sonda sa mémoire, recherchant le passage où l'homme lui avait expliqué, en détail, l'utilité de chacune des cartes. Par malheur, c'était cette partie de l'entretien que son esprit avait choisi pour se dérober à ses obligations et changer de cap, acquiesçant durant la conversation comme l'aurait fait un droïde, comme si cela avait été codé dans son protocole.
     Des symboles figuraient sur ces cartes. Des symboles qui lui auraient été précieux si seulement il avait su à quoi ils correspondaient. Mais Sid n'en avait aucun souvenir.
     « Laquelle de ces cartes ouvre cette foutue porte ? », hurla-t-il pour lui-même, tournant et retournant les fiches dans la paume de sa main, éprouvant le plus grand mal à se rappeler de l'échange qu'il avait eu avec ce type. « Et si je les essayais toutes ? proposa-t-il à haute voix, comme pour se rassurer de son choix. Non, fit-il, déçu, il doit y avoir une limite de passage. C'est sûr. »
     Puis il décida de procéder par élimination. La carte devait être présentée à l'intérieur de la fente et non pas à proximité. Il lui suffirait, en toute logique, de comparer la taille de la fente avec celle de la carte. Mais comme un fait exprès, la largeur des cartes était identique ; pour l'ensemble des fiches. « Les présenter une fois seulement ne me ferait pas courir un grand risque, fit-il, tâtonnant. Après tout... »
     Sid ouvrit les jeux de cartes plastiques à la manière d'un éventail comme durant une partie de belote et les passa une à une devant le lecteur. La porte ne se déverrouilla qu'au bout de la douzième, celle recouverte d'un halo couleur crème et il songea intérieurement : même au Paradis il faut montrer patte blanche.
     Un peu de rouille se dispersa dans l'air lorsque la porte s'ouvrit en gémissant et il put embarquer à bord du vaisseau-cargo, endossant pour une période indéterminée, le grade de capitaine de navire spatial.
     Le tour du propriétaire fut assez rapide puisque comme on le lui avait dit quelques heures auparavant : hormis la cargaison, il était seul à bord du navire. Pas de robot-mécano. Pas de timonier. Pas de robot-cuistot. Qu'il s'agisse d'humain ou de synthétique, il n'y avait rien ni personne à bord de ce rafiot. Sid était seul. Il allait devoir tout gérer lui-même. Pas moyen de déléguer.
     Aucune voix féminine ne se présenta à lui lorsqu'il gagna le pont. Aucune IA ne l'interpella par son prénom pour le mettre au jus du carburant restant dans les cuves ou de ce qu'il y aurait au menu une fois les moteurs lancés. Rien. Mais alors ce qui s'appelle absolument rien.
     Les couloirs n'étaient que partiellement éclairés ; quand ils n'étaient pas dépourvus de lumière. Bien sûr le vaisseau-cargo n'avait rien d'un croiseur stellaire ni même d'une corvette galactique. Même si ce n'était pas le palace du sultan, Sid finirait par s'y sentir comme chez lui à la longue et c'est tout ce qui importait en réalité.
     Il s'enquit des différentes soutes, de l'ensemble des compartiments dont il aurait la charge, vérifia les conteneurs de carburant et contrôla les instruments à sa disposition. Tout était « vert ». Il envoya ses codes de vol à la station et entama sa manœuvre, non sans un certain doigté, pour s'extraire de son emplacement ; l'agent de contrôle n'apercevant que tardivement la toute fin du nom du navire – « SIRE » disparaissant de son champ de vision.
     Plein gaz. Direction : Cap Harris, la première station de ravitaillement. Jusqu'à son prochain arrêt, Sid aurait tout le loisir d'approfondir ses connaissances concernant le lieu où il se rendait.

2

     Le chemin vous semblera interminable jusqu'au Cap Harris. Mais ensuite, tout devrait rouler.

     Alors que les pilotes les plus chevronnés n'avaient qu'une crainte lorsqu'ils entamaient leur périple extrasolaire – à savoir : traverser la ceinture d'astéroïdes – Sid n'avait qu'une seule et unique chose à déplorer : cette incroyable lenteur qui ralentissait son départ du système solaire. Même en poussant le navire dans ses derniers retranchements, ses réacteurs réglés si fort qu'ils auraient pu embraser le cosmos tout entier, celui-ci paraissait faire du surplace. Sid dut tout de même s'y résigner et continua jusqu'au Cap en pilotage automatique ; réduisant de manière importante sa consommation énergétique.
     Le dernier occupant avait cru bon de laisser dans la mémoire de l'ordinateur de bord une sélection musicale des plus singulières. Alors qu'il consultait son itinéraire sur les cartes stellaires, Sid choisit quelques morceaux, en fonction de leur titre (cela allait de soi), et se laissa bercer par la douce voix d'Eddie Vedder qui interprétait Rise ; une chanson qu'il avait déjà entendue et qui semblait surgir tout droit de son passé. Et tandis qu'il se perdait au beau milieu de tous ces corps célestes aux coordonnées presque infinies, Sid se surprit à rêvasser ; alors que ce n'était aucunement dans ses habitudes. Il se voyait à la barre d'un bateau de pêche, se démenant pour que son embarcation ne chavire pas, en prise avec une mer des plus agitée. Furieuse. Et cette vision ne l'effraya pas. Non. Elle lui parut même d'une cohérence féroce. Comme si, se rêver maître d'un autre navire – terrestre cette fois – était tout à fait normal ; même si l'époque paraissait lointaine.
     Au-dessus de lui, crachotées par les vieux haut-parleurs, les paroles que chantait Vedder traversèrent son esprit comme une flèche transperce une pomme :

I'm gonna rise up
Find my direction magnetically.

     Cet ensemble de pensées, de sons, trouva en lui une profonde résonance. Comme si l'univers cherchait à imposer quelque chose à son esprit. Comme si on cherchait à lui faire comprendre, prendre conscience d'une vérité essentielle.
     C'est à ce moment, alors que l'épiphanie semblait proche, prête à éclater, que des voyants clignotèrent sur le tableau de bord, signalant une brusque perte de température dans la zone du convoi.
     Il emprunta l'échelle de métal à toute vitesse et arriva dans la coursive principale. Longeant les murs, obligé de se mouvoir penché tant les couloirs étaient bas, Sid se dépêcha au-devant du problème non sans appréhension. Car lorsqu'il y avait chute de température, il y avait de grandes chances pour qu'une brèche dans la coque en soit l'origine. Et un trou, aussi petit soit-il, si loin du Cap Harris se révélerait alors désastreux pour la suite de l'entreprise. Sid s'arrêta devant la porte de la soute contenant la cargaison : car c'est de cet endroit que provenait le problème. La porte coulissa et il put voir de ses yeux la mystérieuse cargaison qu'il était amené à convoyer sous bonne garde.
     Au centre de la pièce avait été dressée une longue table en ferraille ; autre élément du navire à ne pas avoir été épargné par la corrosion. Sur celle-ci étaient disposées six boîtes de métal, intactes. La pièce balayée de longs rayons écarlates, fouettant les objets qu'ils pouvaient rencontrer, baignait dans une atmosphère de fin du monde. Sid s'avança jusqu'au centre de la pièce, à quelque chose comme un mètre de la table. Tout autour de lui, des leviers, des manettes, des panneaux de commandes pris dans un cadre rayé fait de noir et de jaune. Des couleurs propres à l'éloignement, à la mise en garde.
     Après un examen rapide, Sid conclut que la pièce ne souffrait d'aucune perte de pression. Car dans pareil cas, les murs se seraient alors entièrement recouverts d'une épaisse couche de glace ; et d'ailleurs l'ouverture de la porte aurait été impossible. Il leva la tête vers le plafond et annonça d'un ton calme : « fin de l'alerte. » Son ordre fut suivi d'un long bip et la pièce retrouva son éclairage habituel. L'IA fonctionnait encore après tout. Un coup d’œil aux différents panneaux de commandes conforta Sid dans l'idée qu'il s'était fait à la seconde où il posa le pied à bord du vaisseau : le vieux briscard devenait maboul. Pas étonnant vu l'état de délabrement de l'appareillage et du système tout entier. Un miracle que la carlingue tienne encore le choc après tout ce temps.
     Le cadran indiquait pourtant une température négative. Sid tapota la plaque lumineuse et les chiffres changèrent le temps d'un clin d’œil : passant de +23°C à -17°C avant de grimper à nouveau jusqu'à une température plus clémente. Pourtant, il pouvait ressentir ce « froid » qui engourdissait l'extrémité de ses membres et le piquait jusque dans sa moelle ; et ce n'était pas qu'une image, il sentait son squelette s'envelopper d'une fine croûte de métal glacial. Il approcha une main hésitante de l'un des murs de la pièce et se rendit compte que l'apparente fraîcheur n'émanait pas des parois, mais d'un point plus proche de lui. En vérité droit devant lui. Un simple passage au-dessus du monticule de boîtes, suffit à sa main pour se faire attaquer par la froidure, mordant dans sa chair tendre comme l'aurait fait un animal affamé. Et la voix de Johnny Cash, soufflée d'outre-tombe par les enceintes suspendues au plafond :

There ain't no grave
To hold my body down.

     De retour sur le pont, Sid regarda par les larges vitres disséminées tout autour de la cabine de contrôle : le Black Desire se dérobait à la vue de Pluton, hostile planète glacée, seule témoin de sa fuite.
     Jusqu'au Cap, les alertes fictives se multiplièrent.

3

     Vous risquez de ne pas vous sentir dans votre assiette, certain jour. Il ne faudra pas paniquer. C'est une sensation commune qui est appelée le « mal de l'espace ». N'en tenez pas compte.
    
     Cap Harris se dessinait droit devant, station standard perdue au beau milieu de la Voie Lactée, infime morceau de civilisation isolée de tout. « Le type qui bosse ici doit avoir la paix. C'est sûr ! », fit-il alors qu'il amorçait l'amarrage, chassant de son esprit toute pensée angoissante. Du moins, il s'efforçait de les chasser. Au cours de son voyage, des stations comme Harris allaient devenir courantes. Et bientôt, il n'y ferait plus vraiment attention, patientant dans le carré visiteur que le plein de carburant se finisse. Ce n'est qu'après Alskaa – à environ un parsec et demi de sa position actuelle – qu'il  se rendra compte de la forme particulière de ces stations : une silhouette qui rappelait celle d'une immense étoile de mer où les navires se logeaient dans des alcôves perpendiculaires aux bras de l'étoile. Une fois ancré, le navire donnait cette impression de chute dans le « vide » intersidéral.
     « Black Desire. Veuillez donner vos codes de vol, je vous prie, résonna une voix dans le haut-parleur.
     Sid fit mine de chercher la liste contenant les précieux codes, tentant de faire enrager le type qui se trouvait de l'autre côté du spatiocom.
    Je... je les ais. Une minute.
     Aucune réponse.
    Voilà. Je viens de mettre la main d'ssus. Ouf ! fit-il, singeant le soulagement.
     Toujours rien de la part de Harris.
    Et ben, vous ne devez pas beaucoup vous marrer dans votre p'tite boîte. Ah !
     Son rire gras retentit avec fureur. Il s'éclaircit la voix et ajouta :
    Bon. Euh... PEHM/66.R.7.1-TB.
    Codes validés. Rendez-vous au sas. La porte s'ouvrira à votre venue.
    Bien », dit-il, échaudé.
     Au-delà du sas d'entrée, Sid suivit la coursive baignée de lumière jusqu'à un carré accueillant et désert. Pas le moindre voyageur pour lui tenir compagnie. Il prit place sur un siège pivotant et s'amusa à décrire des cercles avec celui-ci, accélérant la cadence par moments avant de s'arrêter brusquement, tentant de provoquer un semblant de vertige ou de sensation de tournis. C'est que les voyages spatiaux n'offraient que peu de distraction. En tout cas à bord du Black, Sid n'en avait aucune.
     Alors qu'il constatait que son geste n'avait eu aucun effet, une voix s'adressa à lui : le remplissage du carburant ainsi que les diverses réparations sur votre vaisseau prendront un moment. « C'est bien ma veine ça ! », fit-il pour lui-même. La voix reprit, sur le même ton monocorde, ne trahissant pas la moindre émotion : des boissons fraîches ainsi qu'une collation vous seront servies à la cafétéria si vous en éprouvez le besoin. Pour vous y rendre, suivez les leds bleues. Les toilettes se trouvent au bout du chemin décrit par les leds vertes.
     Sid se leva du siège et chercha d'où pouvait bien provenir cette voix. N'y avait-il aucun agent humain en activité à bord de cette station ? « Hé ! lança-t-il un peu dans toutes les directions, ne sachant pas très bien il devait parler. J'ai un problème avec mon détecteur de chaleur. Dans ma soute principale. Là où se trouve mon chargement. Vous serait-il possible de...» Et la voix de le couper au milieu de sa question : pour toutes réclamations, veuillez en référer à l'agent compétent. Pour cela, suivez les leds orange. « Foutue boîte de ferraille mal réglée ! », grommela-t-il dans sa barbe. Il emprunta la voie balisée d'orange, le rayonnement azur d'une étoile toute proche filtrant par les hublots rectangulaires de la coursive et le frappant en plein dos. Sid trouva l'agent en question qui n'était rien d'autre qu'une machine : enregistrant simplement la demande. La boîte de conserve allait-elle trouver le nœud du problème ? Là était la question. Sid n'accordait que peu de confiance à autrui ; surtout les machines. Cela n'avait rien à voir avec une quelconque forme de racisme, loin de là car par le passé, elles lui avaient simplifié l'existence. Il ne croyait tout simplement pas à des capacités qui n'étaient pas les siennes.
     Il rejoignit le carré des visiteurs et patienta. Patienta. Sans montre à son poignet ni écran dans la pièce, il lui était impossible de déterminer le temps passé à attendre sur ce siège que tout soit enfin terminé. Sid regagna le bord du Black Desire sans même une explication. Le plein de carburant avait été fait. Quant aux réparations... Pas un mot là-dessus de la part de la voix qui se contenta d'un cordial « bon voyage ».
     Bien calé dans son fauteuil de bord, son regard passant des témoins de contrôle à la carte stellaire qui dévoilait, petit à petit, son parcours de vol, Sid se demandait s'il n'avait pas présumé de ses forces. Il avait roulé sa bosse, c'était certain. Mais ce voyage là allait lui donner pas mal de surprises. Il en était convaincu.
     Après s'être délivré du Cap Harris, la puissance de ses réacteurs réglés à minima, le Black Desire mit le cap en direction de l'étoile Aldébaran dans la constellation du Taureau. Douze stations étaient notées sur le chemin qu'il allait emprunter. La dernière était située plus loin que les précédentes – la fameuse Alskaa – et cette partie du voyage serait alors assez délicate à gérer en raison du carburant que le vaisseau allait devoir consommer pour parvenir jusqu'à ce point. Mais Sid aurait tout le temps d'y songer. Pour le moment, il gardait un œil sur la température de sa soute principale. Et il ne semblait y avoir aucun souci.
     Depuis le début de son aventure galactique, Sid ne s'était pas couché, pas même assoupi. Sa couchette désespérément vide. Il avait du piquer du nez une, peut-être même deux fois alors qu'il se trouvait dans son fauteuil, mais guère plus. Et pour la nourriture, il n'y avait pas grand-chose à en dire hormis qu'un robot-cuistot lui aurait été superflu. Sid n'avait ni faim, ni sommeil. C'est d'ailleurs ce qui figurait sur son journal de bord. Bien sûr, il n'était pas très bien tenu. Il lui arrivait d'oublier de noter les choses qui se passaient ; si tant est qu'il se passait quelque chose à bord du Black.
     Sur sa route, Sid n'avait pas croisé de bâtiment ; de quelque classe que ce soit. Sa radio n'avait intercepté aucune communication. Pas même d'appel de détresse. Le néant. C'est pour cette raison qu'au bout d'un certain temps, Sid s'était cru seul dans le cosmos.
     Il n'y avait pas âme qui vive. Nulle part.
     Dans l'espace, le temps ne s'écoule pas comme sur Terre. Il n'y a pas vraiment de « jour » et de « nuit ». Le voyageur doit instaurer une sorte de routine fictive afin de s'organiser tout au long de sa « journée ». C'est d'ailleurs dans ces moments-là que des désordres mentaux surviennent la plupart du temps. Sid ne prêtait pas attention à ces fausses recommandations : il agissait comme il l'avait toujours fait, n'obéissant qu'à lui seul, se fiant à son propre jugement.
     L'ensemble de ses vérifications terminées, Sid laissait le vaisseau en pilotage autoguidé ; en vérité, il le laissait enclenché tout le temps. Puis, il prenait un peu de temps pour se balader. Ce n'était pas un bâtiment énorme et le tour était vite fait, mais il aimait parcourir les couloirs, attentif à la voix de son navire. Sid pensait l'entendre parler. Parfois. Lorsque loin derrière le grondement des machines et du roulis des pompes, le murmure céleste rencontrait la carlingue du Black et que débutait cette sourde mélopée – qui selon les bruits qui courraient dans les stations de transit, n'avait jamais cessé depuis le commencement des temps. Oui, il appréciait ces promenades rien que pour cela. C'est d'ailleurs après l'une d'elles que Sid sentit un changement.
     Deux stations au-delà de Harris, le vaisseau traversa un amas stellaire : cohorte d'étoiles collées les unes aux autres comme une poudre étincelante dispersée dans le vent. Les vitres donnant sur l'extérieur s'opacifièrent au contact des rayons aveuglants qui sévissaient tout autour et le Black poursuivit sa route dans une obscurité quasi totale ; en dépit de la lumière dispensée par les consoles. Sid remontait un long couloir, s'orientant uniquement grâce à son ouïe, lorsqu'il aperçut son reflet sur une surface vitrée. Il reconnut son anneau d'or toujours accroché à son oreille ainsi que sa barbe qui lui allongeait le visage en raison de sa longueur ; le faisant ressembler à un vieillard. Mais ce n'était pas tant cette affreuse figure malade que le gonflement qui déformait sa lèvre inférieure ainsi qu'une partie de son menton qui l'avait fait sursauter. En effet, sa bouche paraissait imiter une moue boudeuse. Cette disgrâce faciale avait tout l'air d'une piqûre de moustique ; ou d'une allergie alimentaire à la rigueur. Mais Sid n'avait rien avalé jusqu'ici. Cette hypothèse pouvait donc être écartée. Restait la piste du moustique. Pour en avoir le cœur net, Sid allait devoir explorer la dernière probabilité. « Éfidemment, il n'y aucume inpirmerie fur ce butain de gargo ! », hurla-t-il, s'exprimant avec difficulté. Non, le Black était dépourvu de poste d'infirmerie. Il n'y avait même aucun robot-doc. Sid allait devoir se débrouiller seul.
     De retour dans son fauteuil, il cala la mallette d’aluminium – qu'il trouva dans un recoin du vaisseau –  sur ses cuisses et déverrouilla l'objet d'un simple mouvement du pouce. L'objet se déplia au ralenti, comme grippé : une surface vitrée se redressa en oblique par rapport au second panneau plat et lisse qui garda sa position horizontale. Un disque vert y palpitait. Sid l'effleura. La surface vitrée s'anima et une flopée de touches circulaires s'illumina. Une suite de fenêtres de démarrage se succéda sur l'écran avant de se figer sur une page de présentation. L'interface de la valise médicale ne semblait pas très complexe. Et tandis qu'il perçait le système d'exploitation, Sid sentit ses gencives le lancer comme après s'être fortement brossé les dents, dérapant par moment sur la chair molle. Ses battements cardiaques remontèrent jusqu'à son crâne et la douleur s'accrut sans crier gare : la rendant difficilement supportable. À l'aide de deux doigts, Sid se massa les gencives et de l'autre main nota ses « symptômes » dans une ligne de recherche et attendit qu'arrive le résultat.
     La machine grommela. Le système passa en revue l'ensemble de ses données lorsqu'une goutte de sang explosa non loin du pavé numérique. Sid porta une main à son nez et lorsqu'il l'examina, ses doigts avaient pris une vilaine teinte écarlate.
     Un bip l'avertit que la recherche venait de toucher à sa fin. Et tout en retirant une incisive de sa bouche douloureuse, Sid déchiffra péniblement ce qu'affichait l'écran. Ce n'était pas concevable.
     Il s'affala dans son fauteuil, cassé par une fatigue soudaine. Dans son dos, la mallette affichait : SCORBUT.

4

     Un voyage de ce type peut mettre vos nerfs à rude épreuve. Une trop longue exposition à une solitude forcée risque de vous faire perdre les pédales. Par moment, il vous semblera entendre des voix. Des voix de personnes que vous connaissez. Ignorez-les. Cela vaudra mieux pour vous.

     Sid essaya de se calmer en se focalisant sur le ronronnement cyclique des réacteurs, étendu dans son fauteuil, sa bouche allégée de trois autres dents. Il se redressa avec précaution, la tête comme prise dans un étau et referma la mallette sans même prendre le temps de l'éteindre. « Ne Schcormut ! Foupa ticouner gnon pu », psalmodia-t-il, expulsant deux calculs par sa bouche. Calculs qui n'étaient rien de moins que deux molaires.
     Sid n'avait pas tort. Le scorbut faisait partie des maladies éradiquées depuis la fin du XXIe et se répandait autrefois sur les bateaux de pêche ; jamais à bord de vaisseaux spatiaux. Il n'y avait pas de raison qu'il contracte une telle infection et surtout aussi loin de la Terre. Non. Cela n'avait pas de sens.
     Quittant son fauteuil, il fit quelques pas et ne dépassa pas les consoles, sa tête prise de vertiges. Puis le Black Desire accéléra sans raison. Dans sa chute, Sid percuta le fauteuil – la mallette médicale se fracassant sur le sol grillagé – avant de s'échouer non loin de l'échelle, la nuque en partie dans le vide. Et pour la première fois, le capitaine abandonna la barre, son navire en proie à l'inconnu.

*

     À son réveil, d'autres dents avaient foutu le camp – qu'il avait failli avaler en reprenant sa respiration – et les mots qui sortaient de sa bouche étaient incompréhensibles. Il s'était écoulé un temps infini avant que Sid ne reprenne conscience, c'est cette impression que lui avait laissé son évanouissement.
     Une vive lumière rouge habitait le pont principal et une sirène stridente emplissait tout le navire : les alertes fantômes avaient repris. Un bref coup d’œil en direction de la proue du bâtiment et il vit une gigantesque sphère briller d'un éclat maladif, un avant-goût de l'enfer. Sur ce disque apparaissaient les contours d'Alskaa et c'est dans cet état de confusion que Sid remarqua la structure étoilée.
     Les écrans de contrôle annonçaient que le Black se rapprochait de l'étoile Aldébaran. Impensable ! Il n'avait pas sombré si longtemps ; et même en dépit de ce que lui dictaient ses sens. Si tel était le cas, cela voulait dire qu'il ne s'était pas arrêté aux autres stations. Le vaisseau avait dérivé, par Dieu sait quel miracle, et avait échoué ici dans cet autre quelque part. Ça paraissait trop beau pour être vrai. À moins que quelqu'un se soit chargé des ravitaillements. Auquel cas, le ou la personne était encore à bord.
     Mais il délaissa vite cette idée : car dans le coin d'un écran de contrôle, il remarqua le symbole d'une jauge. Une jauge vide. Le vaisseau dérivait. Il n'y avait pas de doute possible. Ce qui signifiait que l'alerte provenait bien de la soute et qu'il allait à nouveau devoir s'y rendre.
     Descendre lui prit un temps fou. Son état fébrile rendit son équilibre plus que précaire. Ses gencives se mirent à saigner, après le second échelon, et sa bouche s'emplit d'un mélange de salive et de sang qui l'obligeait à cracher. Il progressait dans un brouillard sanglant créé de toutes pièces par son esprit. La taille du navire ne lui semblait plus si anodine à présent : effectuer un pas lui prenait une éternité. Quatre ongles de sa main droite sautèrent lorsqu'il se réceptionna, non sans maladresse, au bas de l'échelle. La traversée des différentes coursives ne se fit pas sans embûches et lorsque la porte de la soute principale se profila à l'horizon, Sid n'avait plus de dent ni d'ongle, sa silhouette voutée semblable à celle d'un grabataire. Il prit appui là où il le pouvait, ses forces se dérobant peu à peu lorsqu'il pensa discerner un appel de l'autre côté de la porte. Dans la soute principale.
     Capitaine ?
     La perte de tout ce sang.
     Hé par ici !
     Sa tête le faisait souffrir.
     Aidez-nous !
     Sa tête lui jouait des tours.
     S'il vous plaît, ne nous laissez pas !
     Comme on le lui avait dit.
     Hé capitaine ! On se les gèle.
     Non. Non. Ça frisait le délire.
     Ouais, soyez pas comme ça. Venez nous tenir chaud. C'est que ça caille ici !
     Sid se remit debout, apposant ses mains ensanglantées sur la porte. Il parvint à se maintenir droit, calant ses pieds pour ne pas glisser et ouvrit la porte de la soute, n’appréhendant plus vraiment ce qui se trouvait de l'autre côté.
     Le souffle frigorifique enfermé dans la pièce s'échappa comme un assassin poursuivi par la police, forçant Sid à se cramponner. Il rentra dans la soute et ses yeux se posèrent d'instinct sur les six boîtes.
     Ho hé ! Du bateau !
     Elles n'avaient pas bougé contrairement au reste de la soute qui semblait avoir terriblement souffert.
     Qu'est-ce que vous attendez ?
     Les murs étaient emprisonnés dans une épaisse gangue de glace à la robe anisée. Tout comme le sol.
     Vous comptez nous laisser crever ?
     Malgré son infirmité grandissante, Sid pénétra dans la pièce, prenant soin d'enjamber le tapis gelé dont l'épaisseur semblait moins importante du côté de la porte. Un disque de décongélation se dessinait dans un rayon de deux mètres autour de la table de métal, autour des boîtes. Comme si le monticule de boîtes était l'épicentre du phénomène : les immunisant en quelque sorte.
     Le Black Desire continuait de se perdre dans l'espace, tournoyant à proximité d'Aldébaran. Tout à coup, le navire se mit à trembler. Avait-il heurté un morceau de météorite ou les débris d'un navire abandonné ? La question subsistait. Et Sid glissa sur le sol détrempé, percutant la table à hauteur de hanche avant de s'y allonger, transit de douleur.
     Les voix se firent plus rageuses, plus vindicatives.
     Ha ! Ha !
     Yaup ! Les mecs, c'est l'capitaine que v'là !
     Pourquoi ?
     Hein ? Pourquoi salopard ?
     Pourquoi t'as rien fait ? Ordure !
     Ravi qu'tu viennes nous rendre visite, enfoiré ! Tu vas pouvoir apprécier notre charmante hospitalité.
     On n'a pas fait l'ménage. 'scusez ! Ha !
     Sid tenta de se reprendre, mais entre le froid, l'humidité et le sang qui rendait tout ce qu'il touchait poisseux et glissant, il ne put que se renverser et heurter le sol avec force. Une fois sur son séant, il constata avec horreur que, non seulement, les boîtes avaient quitté leur perchoir, mais qu'elles s'étaient répandues sur la gangue glaciale. Le vaisseau tangua de nouveau et Sid roula sur lui-même avant de s'étendre, éreinté, dans le contenu des boîtes, sorte de liquide brunâtre à l'odeur plus que douteuse. Il tenta de se nettoyer en se frottant le visage et les mains, mais il ne fit que s'en tartiner davantage.
     Haaaaaaaaaa ! C'est là qu'on va s'marrer les copains !
     Alors qu'il se démenait avec cette mélasse malodorante, la glace se mit à fondre et le niveau d'eau monta rapidement. Épuisé à force de repousser les assauts malveillants des boîtes, Sid se laissa emporter et sombra sans combattre.

*

     Il rouvrit les yeux, assis dans son fauteuil. Sa cabine ballottait de droite à gauche et son cœur qui se soulevait. La première chose qui l'intrigua fut ses mains : car ses ongles étaient revenus. Du bout de la langue, il caressa ses gencives qu'il pensait tuméfiées. Mais en lieu et place du vide ses dents avaient refait leur apparition.
     Plus étrange encore, cette lumière crue qui venait du dehors. De l'autre côté de ces vitres embuées. Cet extérieur qui ne pouvait pas être puisqu'il se trouvait dans l'espace.
     Grosse erreur. Le vaisseau dont Sid avait désormais les commandes était un navire de pêche : un chalutier voguant sur une mer déchainée. Un bateau en proie aux caprices de Mère Nature car, en plus des vagues aux allures de gueules démesurées, le ciel revêtait son habit hivernal : de lourds flocons laiteux tombaient en abondance sur le pont.
     Sur ce même pont s'affairaient cinq hommes emmitouflés dans d'épais cirés rouges : manipulant d'énormes casiers grillagés à l'intérieur desquels étaient accrochés des appâts. L'un d'eux noua un cordage au casier avant de lancer la bouée orange qui se trouvait à son extrémité. Ils continuèrent leur besogne sans le moindre temps mort. Déchargeant les « pièges » dans la mer qui les cernait de toutes parts, leurs gestes exécutés avec foi et conviction. En fin de compte, ces types n'avaient pas tellement le choix : balancer des casiers pour attraper le maximum de prise était pour eux leur seul moyen de mettre du pain sur la table.
     Le plus petit des cirés se retourna une fois la cage avalée par les flots. Il lança son regard bleu acier au capitaine enfermé dans sa cabine. Un regard que Sid put difficilement soutenir ; pourtant atténué par la neige qui tombait dru. Un regard dans lequel on pouvait revivre toutes les saisons accomplies à ramener du crabe – par tous les temps possibles et imaginables et ce même avec une fièvre de cheval et les genoux en vrac – depuis qu'il avait voulu embrasser cette carrière. Un regard dilué dans des litres et des litres d'alcool.
     Contre toute attente, ils se tenaient tous là à braver la tempête que l'on annonçait meurtrière, se dépêchant de décharger le maximum de casier avant la nuit qui s'abattait vite en mer de Béring. Non, ces types n'avaient peur de rien.
     Pour tout dire, Sid avait le mauvais rôle dans cette histoire. Pour la simple et bonne raison que ces gars se gelaient le cul dehors et que lui restait bien eu chaud dans son perchoir. Mais il ne fallait tout de même pas oublier que s'ils remontaient du crabe royal demain, ce serait grâce à lui. Déterminer le meilleur endroit pour pêcher était une science exacte : Sid n'avait pas le droit à l'erreur. Si jamais il venait à se mettre dedans, il condamnait également son équipage ainsi que leurs femmes et leurs enfants. Et cela il ne pouvait pas se le permettre.
     Après le dernier casier, l'équipage se retrouva pour dîner ; sans Sid. Il ne descendit pas aux cuisines et préféra rester dans sa cabine, grillant cigarette sur cigarette, se faisant du mouron à propos du mauvais temps qui, décidément, ne voulait rien entendre et refusait toute embellie.
     Au-dehors, le vent soufflait toujours. La neige n'avait pas cessé. Pire encore, les flocons se multipliaient et de courtes stalactites se formaient le long des pontons de fer. La nuit allait être longue : il allait devoir rester réveillé au cas où, pour ses matelots.
     Trois cents kilomètres au sud, le jour disparaissait derrière les terres enneigées d'Alaska et Sid veillait, son cendrier débordant de mégots et sa cabine rythmée par les bips-bips de son sonar.
     Quarante années passées à la barre du Mauvais Garçon ne l'avaient pas épargné et jusqu'à cette nuit, il n'avait jamais failli. Jamais. Un bref moment d'inattention lui avait suffi pour sceller son destin ainsi que celui de son équipage. Une décision qui le poursuivait encore.
     Harassé par la tâche, Sid n'avait quitté la barre des yeux qu'un court instant. Ses compagnons d'infortune dormaient à poings fermés et à leur réveil, ils se retrouvèrent pris au piège d'une infinie mer de glace. En quarante ans, il ne s'était jamais endormi. Jamais. Il suffit d'une fois.
     Le Mauvais Garçon était censé relever ses paniers et les décharger à Dutch Harbor d'ici après-demain. La saison du crabe des neiges touchait à sa fin et Sid allait toucher le pactole. Mais son karma en avait décidé autrement.
     Son équipage se rendit compte de la catastrophe en même temps et il ne put les empêcher de faire irruption dans sa cabine, prêts à tout casser. Il alla au charbon avec sa phrase fétiche qui l'avait, par le passé, tiré de bon nombre de situations conflictuelles : « Mais bon Dieu de merde, qui c'est l'capitaine sur ce putain de rafiot, hein ? »
     Tenter de calmer le jeu ne fut pas une mince affaire. Pris dans la glace, le bateau n'arriverait pas à faire repartir ses moteurs. D'autant que le brise-glace le plus proche était occupé à dégager un autre navire de la flotte. Le sort jouait de malchance. Pour couronner le tout : le fond du stock de vivres était presque visible. Même s'ils en venaient à bouffer les appâts, les membres d'équipage du Mauvais Garçon ne tiendraient pas longtemps. Et s'ils ne mouraient pas de faim, le froid se chargerait d'eux.
     Plusieurs appels à l'aide furent envoyés du Garçon, mais personne ne put leur porter secours.
     Lorsqu'on les découvrit une semaine plus tard, leurs corps givrés, figés dans leur posture de travail, les sauveteurs mirent la main sur le livre de bord. Voici ce qu'écrivit Sid Fisker, feu le capitaine du Mauvais Garçon :
     « Il n'y a rien que je puisse faire pour renverser la tendance. Ce désastre est dû à une extrême négligence. La mienne. Et j'en porte tout le fardeau. Quatre de mes hommes sont morts et le dernier a voulu tenter sa chance sur la mer de glace. Paix à son âme. Étant capitaine du navire, je ne peux me résoudre à quitter mon bâtiment. Mon âme restera pour toujours liée à celle de mon équipage. Qu'il en soit ainsi. »

4 (suite)

     Brusque revirement de situation.
     Sid était bien mort de froid sur son chalutier en mer de Béring, au large de Dutch Harbor mais le scorbut n'avait pas fait de lui une immonde carcasse sans dent et sans ongle.
     La soute n'avait pas été balayée par une puissante lame de fond venue de nulle part. Tout était à sa place. Même les boîtes de métal, disposées avec soin. Au plafond, la musique tournait toujours. S'était-elle seulement arrêtée ? Sid reconnut la chanson d'un vieux groupe de rock américain. Bon Jovi. Et les paroles, aussi curieux que cela paraisse, revêtaient un sens pour lui :

I'd drive all night just to get back home
I'm a cowboy, on a steel horse I ride
I'm wanted, dead or alive

     Une ombre apparut dans un coin de la soute. Petite et au regard bleu acier. Cette ombre fut suivie d'une seconde, immense et vêtue d'une salopette verte. Ces deux ombres furent rejointes par trois autres qui semblaient sortir des parois. L'équipage fantôme du regretté capitaine revenait le hanter à bord du Black Desire. Il avait failli à son devoir et son âme en gardait une trace, même dans le cosmos. Et à mesure que se rapprochaient les ombres, la conversation qu'il avait eue avec ce type étrange, durant cet entretien, lui revint subitement comme la détonation d'une arme à feu :

     Hormis la cargaison, vous serez seul à bord du navire.
     Le chemin vous semblera interminable jusqu'au Cap Harris. Mais ensuite, tout devrait rouler.
     Vous risquez de ne pas vous sentir dans votre assiette, certain jour. Il ne faudra pas paniquer. C'est une sensation commune qui est appelée le « mal de l'espace ». N'en tenez pas compte.
     Un voyage de ce type peut mettre vos nerfs à rude épreuve. Une trop longue exposition à une solitude forcée risque de vous faire perdre les pédales. Par moment, il vous semblera entendre des voix. Des voix de personnes que vous connaissez. Ignorez-les. Cela vaudra mieux pour vous.
     Voici la véritable raison de votre voyage jusqu'à la Nébuleuse du Crabe, dans la Constellation du Taureau : l'endroit où je vous envoie.
     Dans votre vie, vous avez fait, comme un grand nombre d'êtres humains, des bons et des mauvais choix. Mais il en est un, dans votre karma, qui vous poursuivra toujours à moins que vous ne répariez cette faute : c'est d'avoir précipité votre équipage dans une mort atroce. Vous avez failli à votre devoir de capitaine et c'est une erreur qui ne peut s'effacer et se monnaie assez mal.
     Pour vous racheter aux yeux de vos hommes, vous escorterez leurs âmes jusqu'à la Nébuleuse, là où évolue un vivier de crustacés stellaires proches de vos crabes et qui, dit-on, ne tarit jamais. Ainsi vous pourrez poursuivre votre but par-delà la mort et tenir votre parole. Car s'il y a bien une chose qui a de l'importance et qui est une constante dans l'univers, c'est de donner sa parole et de s'y tenir.

     Les ombres flottèrent vers la porte de la soute, la plus petite s'arrêta devant Sid et le dévisagea de ses yeux de bombardier. Dans un faible chuintement, il s'adressa au capitaine en ces termes : « Loué soit le sombre héraut qui est venu porter sa parole afin que vous puissiez tenir la vôtre ».

                                                                                                                                                              FIN.





  


Dragon Ronchon
d'




Plic. Ploc. Plic. Ploc…

Encore ces satanées stalactites. Y’a rien qui énerve un dragon autant qu’une stalactite en formation. C’est vrai quoi, ça dure des millénaires à se fabriquer et ça sert à rien. Mais alors, absolument à rien ! Y’a bien les Humains qui s’extasient, « ohhhhh regarde celle-là, elle ressemble à un… à une... hum hum » mais même eux se lassent au bout de quelques minutes. Imbéciles. Et nous, pauvres dragons, on supporte le bruit des gouttes qui tombent pendant des siècles. Certaines nuits, on peut même imaginer le cheminement de la goutte d’eau qui entre dans la grotte par infiltration, ruisselle le long de la concrétion calcaire, ajoutant sa touche personnelle à un édifice millénaire, et qui termine sa chute loin, loin en bas... En général, au matin de ces nuits là, on a une migraine d’enfer. Les stalactites, ça fiche la migraine, c’est moi qui vous l’dit. Foi de Dragon Ronchon.

Tiens, d’ailleurs, c’est pareil pour les Nains. Evidemment, un Nain, ça n’est pas millénaire. Mais c’est bruyant ! Vous n’avez pas idée. Ils passent leur temps à piocher. Je pioche, donc je suis, ça doit être ça l’adage des Nains. Du coup, de l’aurore au crépuscule, on peut entendre résonner les coups et leurs chansons naines. Ah oui, les chansons Naines. Ils en raffolent. Pas nous. Vous avez déjà entendu chanter un Nain ? Je ne parle pas des Nains champêtres, ceux qui poussent une brouette pleine de fleurs à côté d’un puit en pneu et d’une biche en céramique. Ceux là se tiennent à carreau, ils n’ont pas envie qu’on leur rajoute Blanche-Neige comme garde-fou. Non non, moi je parle des vrais Nains, ceux qui se croient à l’abri dans les montagnes. Ils se comportent comme l’Humain moyen qui croit être seul : ils chantent à tue-tête le dernier tube ringard, aussi fort que faux. Seulement les Humains ont vite compris qu’on ne pouvait pas chanter partout : une petite chanson fredonnée innocemment dans les bois et une flèche vous transperce le couvre-chef illico. Un petit refrain dans la montagne et on a vite fait de se retrouver sous un rocher. Alors du coup ils chantent chez eux et ils ne font de mal à personne (encore que les souris se soient syndiquées, il paraît). Mais les Nains ! Non seulement chez eux, c’est presque chez nous, étant donné que nos grottes sont souvent reliées à leurs souterrains (la géologie nous accable), mais en plus, le son rebondit le long des boyaux ! Déjà cauchemardesque au départ, après des dizaines de lieues de rebonds sur la roche une chanson naine devient une arme de destruction massive.

C’est solide un dragon, mais ça a la santé mentale fragile. Il parait que le vieux Dragon Kepon, qui habitait près d’une grande cité naine, s’est soudainement mis à parler aux fleurs. Evidemment ça pose problème, puisqu’un dragon, avec les griffes livrées en accessoire, n’a pas la précision nécessaire à la cueillette des fleurs. Du coup, il passe sa vie allongé dans l’herbe. Les Humains lui lancent des cacahuètes. C’est plutôt vexant. Et puis les Elfes sont assez contrariés, c’est leur truc la flore et ils n’aiment pas qu’on piétine leurs plates-bandes. On a bien essayé de lui parler, au vieux, on lui a même ramené ses armures-souvenirs, pour lui remémorer ses exploits passés. Rien à faire. Y’a pas à dire, une chanson naine, ça attaque.

Tiens, autre chose encore qui m’énerve. Les alchimistes. Faut toujours qu’ils rajoutent un morceau de dragon dans leur recette. Mais on y tient, nous, à nos écailles ! Après cinq cent ans passés dedans, on devient sentimental, croyez-moi ! Pensez-vous que ça les arrête ? Que nenni ! Encore, les cuistots et les apprentis sorciers ne sont pas trop dérangeants. On en rôtit un ou deux et ils se mettent subitement à cuisiner de la biche et du lapin, ou à aller chercher un rayon de lune à la place. C’est moins douloureux. Mais un alchimiste, c’est têtu et quand il s’agit de potions de grande valeur, ils s’acharnent. Plus d’un dragon s’est réveillé un matin avec une dent en moins et des écailles inscrites aux abonnés absents. Ils ont de la chance qu’on ait le sommeil lourd, c’est moi qui vous l’dis !

D’ailleurs, je planche sur un nouveau système d’alarme, qui nous permettrait de nous réveiller juste à temps pour griller les maraudeurs. Un avertisseur plutôt résistant et suffisamment simple pour que tous les dragons puissent s’en servir… Même Dragonne Mignonne, qui n’a pas inventé le fil à couper le beurre, si vous voyez ce que je veux dire… J’ai bien observé les gobelins (tiens, encore un truc qui m’énerve ça, mais on en reparlera un autre jour), et je crois que j’ai compris comment ils bidouillent leurs machins. Le souci, c’est qu’il me faudrait du cuivre, et moi, côté métal, chuis plutôt équipé or et argent. Va falloir que je lance un raid sur une ville de pauvres. Ou que j’aille sous un pont.

Ah, un pont. Vous avez pas compris pourquoi je pensais aller chercher du cuivre sous un pont, pas vrai ? Allez, rappelez-vous. Vous avez jamais croisé d’imbécile qui balance une pièce dans la flotte, pour faire un vœu ou pour payer son passage aux trolls ? Ah oui, d’ailleurs, tant qu’on y est, cette histoire de trolls, là, qui crèchent sous un pont et bouffent tous ceux qui passent, eh ben c’est une belle arnaque. Vous savez où ils sont, les trolls ? Au pub, comme tout le monde ! Et quand ils ont plus de monnaie pour payer leur Guiness, ils viennent ratisser les fonds de rivières ! Ahhh, ils ont la belle vie, ça c’est sûr ! J’aurais dû faire troll, moi ! Dragon, c’est pénible.

C’est vrai, quoi, regardez. On a des ailes magnifiques, avec une envergure de fous, capable de cacher le soleil, et on vit dans des grottes. Sérieusement. Des grottes. Minables, en plus, sans parler du chant des Nains (on va pas revenir là-dessus, ça va m’agacer, et c’est pas bon pour ma tension). Vous voyez pas où est le problème ? Ah bon ? Vous imaginez, si ça nous gratte sous l’aile gauche, déployer tout le fatras de membranes cartilagineuses DANS UNE GROTTE ? C’est un peu comme ouvrir un parapluie dans un placard, là. D’abord, on a l’air con, et ensuite on se crève un œil. Pis je vous raconte pas comment on galère pour tout remballer. Alors du coup, on doit sortir pour se gratter. Là, vous commencez à comprendre. S’étirer le matin ? Dehors. Les exercices d’assouplissement ? Dehors. Se gratter, se tourner, regarder si on a pas les griffes trop longues… DEHORS ! TOUT doit avoir lieu dehors. Même la chose, là, dont j’ai passé l’âge. Ça a quand même quelques côtés ennuyeux, pas vrai ?

Vous allez me dire, oui mais, au moins, vous êtes riches. Ben oui mais l’or, l’argent, les diamants, et tout le tintouin, on les utilise pas, on dort dessus ! Mais quels cons ! Dormir sur des diamants ! On se ferait moins mal sur des planches à clous ! Bon, au moins, l’or, c’est mou, et en piécettes ça épouse pas mal les formes. Mais bon, faut quand même le piétiner un sacré bout de temps, notre trésor, avant qu’il devienne un tantinet confortable. Non, confortable, je vais trop loin. Tolérable.

Donc, je résume. On vit dans des grottes humides pourries, avec des voisins qui nous rendent fous, on se casse une aile à chaque fois qu’on se retourne et on dort sur ce qu’il y a de pire au monde. Y’a pas à dire, ça envoie du rêve… Enfin au moins le vieil adage « l’argent ne fait pas le bonheur » que votre mémé vous ressort chaque mercredi, vous comprenez d’où il vient, maintenant. C’est parce que votre mémé, en fait, sous son fichu à fleurs, ben c’est une sacrée spécialiste en dragons.

Eh, ça vous la coupe, hein ? 

Bon. Demain, on parlera des chevaliers et des princesses. Vous allez voir, ça va vous plaire. Mais demain. Parce que là, j’ai un trésor à tasser.

Dragon Ronchon, 8ème du nom.



 

16 commentaires:

  1. j ai adorée les deux nouvelles mais celle de jeremy est vraiment bien écrite.
    je pense sincèrement que ce jeune homme a du talent !!! et espère qu il aura un max de vote.

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  2. Un petit plus pour la nouvelle de Jérémy Semet même si celle d'Alizée n'est pas mal. En tout cas, bravo à tous les deux !

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    1. Merci Eowyn. C'est vrai que celle d'Alizée est assez rigolote :)

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  3. Assez déçu par l'histoire de Jérémy... Je trouve l'histoire sympathique mais toute la première partie n'est pas convaincante du tout. Et pas mal d'incongruités scientifiques, ce qui est toujours mauvais dans une nouvelle de SF...

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    1. Il est plus qu'improbable que mon histoire plaise à tout le monde. Il y a un contexte SF mais mon histoire se prête plus au genre fantastique. Le voyage de Sid raconte avant-tout celui de son âme vers un ailleurs, une sorte de purgatoire. Merci du retour.

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    2. L'histoire est plus que sympathique. Je garde la première syllabe et rajoute bolique, voilà on aura compris ce que j'en saisis. Elle brouille les genres et les réunit avec bonheur, c'était un pari risqué, et gagné. J'ai trouvé les incongruités scientifiques ténues, et au terme de la nouvelle elles sont de toute manière excusables (sinon explicables).

      Et puis, si on devait s'en tenir aux incongruités scientifiques, au moins la moitié de la SF serait bonne à jeter. Tiens, en matière d'incongruités, on a eu un Prometheus qui a bien réussi à ne plus tenir la route à une de ces vitesses...

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  4. le Dragon Ronchon
    Clair, drôle, poétique, fantaisiste! Bravo!

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  5. Il est compliqué de départager deux histoires qui ne boxent pas dans la même catégorie. Un texte long contre un texte court. De la Fantasy contre de la SF. Ou du Fantastique d'après l'auteur mais bon la frontière est mince.
    En tout cas, j'ai relu l'histoire de Jérémy et en sachant qu'il est question d'une âme et de son migration vers le purgatoire, certains détails ne me paraissent plus si anodins. Comme l'absence d'infirmerie par exemple. Et ce mixage des genres est un pur régal. En tout cas, cette histoire m'a bien plu.
    Alizée écrit aussi très bien mais dans un style totalement différent. Pas étonnant que ces deux auteurs soient en lice pour la finale.
    Bonne chance à eux deux !

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  6. A des moments différents, j'ai voté pour ces deux nouvelles. Là, il faut les départager ! Pas évident ! >.<

    Sombre Héraut est très beau, très intense mais au final, j'ai voté pour le texte qui le plus en phase avec ma sensibilté du moment. Du coup, j'ai voté pour Dargon Ronchon. J'ai bien ri en le lisant et le texte rejoint bien ce que j'aime lire.

    Voilà, désolée mais il fallait choisir et ça n'a pas été évident ! ^^

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  7. Je pense que Jérémy et Alizée ont du talent et de l'imagination, deux styles différents mais j'ai voté pour Alizée et son Dragon ronchon, texte plus court, plus fantaisiste et tout simplement qui m'a plu. Je me suis un peu perdue dans la nouvelle de Jérémy, mais félicitations à tous les deux et bonne chance.

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  8. Personnellement, je dirais du texte "Dragon Ronchon" qu'il est plus directement accessible en première lecture, plus "tous publics".

    Cela fait certainement partie des raisons pour lesquelles ma propre nouvelle a été battue en demi-finale contre ce même dragon pas content.

    En tout cas, c'est ce que je me dis pour me consoler. :D Bravo aux deux auteurs en finale, en tout cas, et merci pour le spectacle.

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  9. C'est vrai qu'on a un choix cruel à faire. La légèreté rieuse d'un côté, la gravité de l'autre, science-fiction [quoique] pour l'un et fantasy décalée pour l'autre, deux très bons textes, deux excellentes plumes, et on est obligé à la fin de voter avec une totale subjectivité, le coeur balançant pour un type d'histoire ou pour un autre. Drame absolu du lecteur!

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  10. Un petit plus pour la nouvelle de Jérémy. L'histoire est attrayante et la lecture s'ancre plus dans notre imagination et nos rêves.

    Bravo à tous les deux pour votre parcours !

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  11. Merci a tous pour ces retours! Ils font chaud a la plume! Je trouve moi aussi le texte de Jeremy tres bon, d'ailleurs je vote pour lui depuis le debut! C'est vrai que les univers sont tres differents, il en va ensuite de la sensibilite de chacun au moment du vote...

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  12. La nouvelle de Jérémy Semet est disponible en numérique (ePub et Kindle) sous le titre "Cosmic Karma" (0,99 € seulement, 40 pages environ), aux éditions Walrus. Le texte est agrémenté de trois illustrations originales de Vianney Carvalho :

    http://store.walrus-books.com/cosmic-karma/

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